Grand Curtius

La création d'un pôle muséal d'Art ancien en un seul site à haute valeur patrimoniale, regroupant plusieurs collections dispersées jusque-là, révéla un chantier d'une grande complexité, handicapé par les règlements urbanistiques, les lourdeurs du montage financier, les interventions d'associations de protection du patrimoine, les exigences muséales et le nombre important d'intervenants. Du point de vue architectural, la difficulté majeure était d'harmoniser un bâti ancien hétérogène au moyen de liaisons contemporaines. 

La première intervention concerne donc les constructions à caractère patrimonial, souvent protégées par classement ; elle a nécessité des études archéologiques préparatoires poussées. Ces dernières ont permis, dans le cas de la résidence Curtius transformée par D. Dethier par exemple, de reconstituer le portail et les baies d'origine en façade avant. Toutes les restaurations ont été effectuées dans le respect de la Charte de Venise de 1964. 

La deuxième intervention consiste en l'implantation d'éléments contemporains. L'aile dessinée par l'architecte Daniel Dethier, dans le prolongement de la résidence Curtius, installée sur les anciennes parcelles de l'athénée Maghin et de la maison  Sauvage, présente un mur quasi aveugle sur Féronstrée. Animée par de hautes entailles verticales, cette façade s'intègre par son gabarit et ses matériaux (pierre bleue) au tissu urbain environnant avec un travail sur la taille des pierres de parement qui reprend le rythme des corbeaux de corniche. La rareté des percements s'explique par la nécessité d'aménager suffisamment de cimaises d'exposition et de limiter l'apport de lumière naturelle. L'arrière de la résidence Curtius, largement remanié au cours du temps, est doté d'un espace d'exposition vitré, assurant une liaison avec le palais Curtius. De la même manière, une large galerie a été aménagée à l'emplacement du mur qui séparait la résidence du palais par Paul Hautecler et Jean-Marc Huygen ; elle rappelle ainsi la division historique de la propriété du munitionnaire et offre, surtout, une meilleure circulation au sein des espaces muséaux. 

Comme l'explique P. Hautecler, « la pureté des gestes architecturaux, le design intégré aux lieux, la composition poétique des espaces extérieurs, le respect des volumétries existantes et la mise en valeur des structures authentiques ont inspiré une scénographie qui valorise plutôt qu'elle ne transforme ». 

Édith Culot